GRAND REPAS-DEGUSTATION
FRANZ KELLER / OBERBERGEN
16 octobre 2009
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CHÂTEAU AUSONE 1962 (****)
Magnifique couleur rouge.
Arômes racés et complexes avec des notes de menthe, d’herbes de garrigue et de cuir.
On y retrouve aussi des fruits noirs concentrés, dans l’élégance.
Le vin est rond à l’attaque.
La structure est remarquable, sans lourdeur.
Les tannins sont concentrés et encore bien présents.
Le style Ausone un peu austère se ressent.
Le fruit rajeunit à l’ouverture.
L’ensemble est absolument délicieux.
Un excellent millésime d’Ausone, très bien tenu.
MAGNUM CHÂTEAU AUSONE 1953 (*****)
Nez d’une pureté exceptionnelle. Quelle noblesse!
Les petits fruits noirs sont accompagnés par une grandiose minéralité et par des
notes de champignons.
Le vin est concentré et « droit » avec une trame très serrée.
Il semble un peu moins austère que le 1962 et plus structuré encore.
Les fruits noirs denses se marient parfaitement aux tannins aristocratiques.
L’interminable finale, très tonique, est marquée par une fine minéralité mêlée à
un aspect mentholé.
Un fantastique millésime d’Ausone.
CHÂTEAU LATOUR 1953 (*****)
Couleur rouge sang, très jeune.
Les arômes sont encore sur le fruit avec un très grand volume.
Après les Ausone, son style semble particulièrement exubérant.
Le vin est puissant et corsé, mais sans lourdeur.
Il exprime bien la force légendaire du Latour.
L’attaque est très soyeuse.
L’évolution présente un fruit dense et vif.
La finale est très jeune et fraîche grâce à une acidité élevée.
Millésime exceptionnel qui associe la forte nature de l’époque à l’élégance fruitée
d’une récolte saine et mûre.
CHATEAU LA MISSION HAUT BRION 1955 (*****)
Le flacon est parfait!
La race et la noblesse du terroir de Mission s’expriment au plus haut point.
Notes de cuir, d’humus et d’iode.
La pureté est exceptionnelle.
La concentration du vin est impressionnante.
Le fruit est parfait.
Il est charnu et frais en même temps.
Les tannins sont la noblesse même.
La finale, d’une grande intensité, est très jeune et interminable.
Fabuleux vin.
CHATEAU DUCRU-BEAUCAILLOU 1961 (****)
Nez « aérien », très complexe, avec un fruit parfait de récolte.
Il a une élégance particulière avec sa vanille et son boisé noble.
Notes de noix de muscade.
Le vin est vraiment harmonieux.
Le fruit est accompagné par une touche champignonnée.
La finale est serrée et jeune.
Un vin absolument charmeur.
CHATEAU MOUTON-ROTHSCHILD 1961 (*****)
L’évolution de ce vin est parfaite.
Il est très élégant et d’une ampleur sensuelle.
Notes de cerise noires qui font penser à du Porto, mais sans être compoté.
S’y rajoute une légère touche de « mine de crayon », comme dans certains
grands vins du Rhône.
Le vin est charnu et concentré. Au fruit dense se mêlent de la terre juste remuée
et de l’ancre noire.
Il reste très équilibré malgré une certaine puissance.
Les tannins sont fortement constitués mais ils se fondent dans la chair
onctueuse du fruit.
Il a le potentiel pour durer encore longtemps.
CHÂTEAU AUSONE 1961 (*****)
Le nez exprime une vraie nature d’une pureté, d’une élégance et d’une
ampleur exceptionnelles.
On devine un fruit parfait de récolte.
Notes de bois doux ou de réglisse.
Le vin a une rondeur flatteuse à l’attaque mais le fruit n’est pas du tout compoté.
L’ensemble est une pure dentelle fine sans richesse mais dense.
La noble finale est à nouveau marquée par une touche iodée, signe du
grand terroir.
CHÂTEAU HAUT-BRION 1961 (*****)
Comme si les sept premières merveilles ne suffisaient pas, une huitième vient
couronner le tout!
Race, force, noblesse, complexité….
Les fruits noirs concentrés sont accompagnés par des notes de cacao torréfié,
de café, de nougat, de cuir….
Le vin est onctueux, avec une chair voluptueuse à croquer.
La concentration est phénoménale, au point de rendre le vin quasi épais.
C’est une masse fabuleuse qui prend possession du palais pour son plus
grand plaisir car la force des tannins est noyée dans le volume du fruit.
Malgré cette puissance, le vin reste équilibré et sans lourdeur.
Une anthologie.
Les vins commentés ci-dessous ont accompagné le repas qui suivit la dégustation
CHÂTEAU LAFITE-ROTHSCHILD 1990 (****)
Je fus moins impressionné par ce Lafite 1990 que par ceux que j’avais déjà dégustés.
Peut-être à cause du merveilleux développement dont ont bénéficié les vins plus anciens dégustés
juste avant. On devine un très grand millésime de Lafite, très corsé, fort et concentré.
Il est droit et pur, mais il semble que ses grandioses qualités désirent rester pour le moment en
gestation et se faire discrètes.
CHÂTEAU HAUT-BRION 1990 (*****)
Même s’il est d’une insolente jeunesse, ce Haut-Brion 1990 dévoile bien plus ses fabuleux atouts
que le Lafite du même millésime. Franchement, je crois qu’il serait difficile de le trouver inférieur
au mythique 1989 si dégustés à l’aveugle.
C’est une merveille qui ressemble au 1961, en beaucoup plus jeune bien entendu.
CHÂTEAU LA MISSION HAUT BRION 1990 (**)
J’en attendais peut-être trop! Le vin semble assez lourd et déséquilibré par l’alcool.
C’est comme s’il était trop riche ou trop concentré. Il se peut aussi que le flacon n’était pas parfait.
CHÂTEAU MARGAUX 1990 (****)
C’est reconnu, Margaux a produit un 1990 exceptionnel. Ce vin est parfait à tous les niveaux.
Il est puissant et équilibré. Je ne peux m’empêcher cependant de lui reprocher un style un peu
trop « léché » ou trop « dirigé ».
MAGNUM CHÂTEAU MOUTON-ROTHSCHILD 1947 (**)
Le flacon n’était pas parfait. Le vin présentait une dose d’acidité volatile et une certaine oxydation.
Il était absolument buvable cependant. Ses qualités certainement extraordinaires n’ont pu
malheureusement qu’être « devinées ».
RIESLING AUSLESE ERDENER PRÄLAT, DR LOOSEN 2004 (****)
Un Riesling comme j’aime, à 7,5% d’alcool.
Le type du cépage ressort avec ses notes « pétrolées » élégantes et fines.
La douceur « retenue » du vin est compensée par une acidité citronnée et mentholée.
Il est dense et pur. Il va bien entendu encore développer plus de complexité et d’élégance
avec les années. Il est suffisamment structuré pour y parvenir.
CONCLUSIONS
– Château Ausone fut sur toutes les lèvres ce soir-là. Trois grands millésimes furent présentés et
son style spécifique et très peu connu a suscité beaucoup d’intérêt.
– Ausone est vraiment un vin que l’on ne peut approcher qu’à pas très lents. Il faut bien reconnaître
qu’il ne tombe jamais dans la facilité et l’éxubérance. Tous s’accordent à le qualifier d’austère. Mais
ceux qui lui trouvent plutôt un aspect « mystérieux » ont certainement aussi raison. C’est un Seigneur
qui n’a pas l’âme à se manifester bruyamment. Mais quel niveau il peut bien atteindre dans
les grands millésimes!
– Le Ausone 1962 était un magnifique prélude au ton un peu sérieux et intellectuel qui ouvrait cette
fête des sens.
– Le fantastique Ausone 1953 qui suivit était marquant de par sa personnalité et de par sa
grandeur. Plusieurs l’ont placé en tête de tous les vins de la soirée.
– Ausone 1961 était aussi fabuleux que le 1953, mais il m’a semblé plus élégant et plus fin.
Je place ces deux millésimes au même niveau.
– Latour 1953 est aussi grandiose, mais dans un style opposé à celui du Ausone. Ce qui est frappant,
c’est que ce vin de 56 ans n’a pas encore développé des arômes et des goûts tertiaires.
– La Mission Haut Brion 1955 est un condensé de ce que l’on peut espérer de mieux dans ce cru
dont le terroir s’impose comme un trésor bienfaisant. C’est le premier Mission 1955 parfait que j’aie
bu et je confirme tous les commentaires dityrambiques qu’on lui attribue. Pour beaucoup, ce fut le
vin de la soirée.
– Château Ducru-Beaucaillou 1961 m’a paru atypique du millésime car il n’en a pas
l’habituelle concentration ni la même force, mais il est fantastique de par sa jeunesse et de par son équilibre.
– Château Mouton-Rothschild 1961 m’a marqué même si je ne suis pas un fervent de ce cru.
C’est un énorme vin qui représente bien le style Mouton, avec son aspect droit et direct, toujours un
peu « massif ». C’est à l’heure actuelle le plus fameux Mouton que j’aie dégusté après l’incomparable 1945.
– Le Haut-Brion 1961, auquel je donne chaque fois la plus haute note, m’a semblé encore
plus incroyablement concentré et grandiose que les autres! Pour ma part, je l’ai d’emblée perçu
comme « l’événement » de la soirée.