GRANDS BORDEAUX
Château de Villa / Sierre
14 novembre 2008
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CHÂTEAU LAFITE-ROTHSCHILD 2001 (***)
Couleur rouge sombre.
Nez de fruits parfaitement mûrs, dans l’élégance.
Le boisé perceptible est noble.
La discrétion que l’on ressent est peut-être due à la jeunesse.
Le vin est charnu et tendre, sans aspérité.
La structure est moyenne, ainsi que la persistance.
On ne peut lui reprocher aucun défaut, mais on aurait souhaité plus
de force et plus de personnalité.
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CHÂTEAU LAFITE-ROTHSCHILD 1976 (****)
Couleur rouge un peu tuilé.
Nez expansif, sur les fruits très mûrs, avec une remarquable complexité:
pruneau d’Agen, tabac, bois de cèdre, réglisse.
Le vin est voluptueux avec beaucoup de glycérol et un fruit tendrement charnu.
Les tannins sont présents mais fondus.
La densité est moyenne, mais tout est équilibré.
La persistance est rehaussée par une bonne acidité.
C’est un vin “gourmand” pour épicuriens plutôt que pour techniciens.
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CHÂTEAU LAFITE-ROTHSCHILD 1971 (***)
Couleur rouge un peu tuilé.
Le nez indique un vin un peu vieillissant.
A l’attaque, les fruits rouges bien mûrs et très ronds font penser à un
Bourgogne d’ancienne époque.
La finale est vivifiée par une acidité assez élevée.
Vin spécial, tout en dentelle, moyennement constitué mais agréable
du début à la fin.
Il m’a paru meilleur que les autres bouteilles fanées que j’avais
dégustées auparavant.
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CHÂTEAU HAUT-BRION 1988 (*****)
Couleur rouge sombre.
Nez racé, noble, dense et complexe: fruits parfaits de récolte, nougat, cuir,…
Le vin a une trame très serrée.
Une certaine richesse se ressent, mais sa forte structure lui octroie l’équilibre
nécessaire pour qu’il ne soit pas lourd.
Les notes minérales-iodées du terroir sont fantastiques.
La longueur extrême indique le grand millésime.
Il n’est pas encore au sommet de ses capacités.
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CHÂTEAU HAUT-BRION 1975 (****)
Couleur rouge dense légèrement tuilé.
Magnifique dentelle au nez, avec une grande pureté.
Le développement des arômes est optimal.
Le vin est concentré, mais sans aucune lourdeur.
Le terroir domine les autres composantes avec ses touches d’iode
et d’humus.
Vin de haute aristocratie qui s’exprime dans l’ensemble avec une
certaine retenue si on le compare au 1970.
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CHÂTEAU HAUT-BRION 1970 (*****)
Couleur rouge sombre.
Nez extrêmement ouvert et complexe avec de beaux fruits denses et fins.
Le style du cru est là, avec sa noblesse habituelle.
Le vin est volumineux et fort, avec beaucoup de gras.
La chair veloutée enrobe bien les tannins durant toute la très longue
persistance…..toujours sans lourdeur, quel bonheur!
Etonnant pour un vin qui ne s’était jamais ouvert!
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CHÂTEAU AUSONE 1986 (****)
Couleur rouge dense.
Nez “classique” vraiment complexe: petits fruits noirs, cacao, bois
oriental, minéralité de pierre à feu.
Le vin est rond mais ferme.
La structure remarquable s’impose sans insistance.
La finale est très fraîche.
Vin de grande personnalité qui donne beaucoup de plaisir à l’heure actuelle.
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CHÂTEAU AUSONE 1976 (*****)
Couleur rouge dense.
Le nez est une délicatesse avec beaucoup de complexité: fruit très
mûr sur le pruneau d’Agen, cacao, nougat, boisé fin, fourrure.
Le vin est tout de velours et de distinction.
Les tannins sont encore fermes en finale.
Touches minérales-fumées très intéressantes qui donnent beaucoup
de personnalité au vin.
Une des réussites du millésime à Bordeaux.
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CHÂTEAU AUSONE 1970 (*****)
Couleur rouge dense.
Nez sensuel, dense et fin.
Le fruit, parfait de récolte et encore très jeune, s’allie à des notes de
tabac blond.
Le vin bénéficie d’un équilibre absolu de toutes ses composantes.
Il est très long et concentré, sans lourdeur.
Encore en phase ascendante, ce 1970 est étonnant, vu les préjugés
longtemps émis à son sujet.
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CHÂTEAU AUSONE 1964 (*****)
Couleur rouge un peu tuilé mais dense.
Les arômes révèlent un vin au sommet de son développement.
Il est dominé par des notes tertiaires élégantes (humus, terre noire, réglisse)
mais il ne paraît pas vieux.
On y retrouve aussi une agréable touche de Porto.
Le vin est rond, riche et velouté.
C’est une grande nature dont la consistance de bouche n’est pas
vraiment imposante.
Mais sa longue et majestueuse persistance est marquante.
Ce vin est une grande réussite du millésime.
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CHÂTEAU MOUTON-ROTHSCHILD 1986 (*****)
Couleur rouge-noir très sombre.
Au nez, on est d’emblée impressionné par la puissance des arômes.
On y ressent des fruits noirs bien mûrs, du cassis, de la myrtille et de
la réglisse.
Le vin est un “jus” fantastique.
Il est très puissant mais pas brutal.
Ses tannins sont grandioses mais encore peu amadoués par le temps.
Grand sujet à attendre encore.
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CHÂTEAU MARGAUX 1983 (*****)
Couleur rouge-noir sombre.
Nez racé et fort, sur les fruits rouges denses avec des notes empyreumatiques.
Le vin est corsé mais assez fin.
Son fruit est vraiment concentré et charnu.
La longueur est extrême.
Un très grand vin “dynamique” avec beaucoup de potentiel.
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CHÂTEAU CHEVAL BLANC 1975 (*****)
Superbe couleur rouge limpide et brillant.
Le plaisir olfactif est intense.
Les arômes retransmettent une perfection fruitée d’une élégance
peu commune.
Le vin est charnu au possible, il voisine même le sucre à l’attaque.
Son fruit velouté, dense et ferme se marie à merveille avec la
noblesse du terroir.
La persistance est impressionnante.
Vin de haute expression, absolument délicieux.
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CHÂTEAU PETRUS 1947 (**)
(mise Sanders)
Couleur rouge sombre.
Nez fruité très expansif et exubérant.
L’acidité volatile est presque intempestive.
Le vin est puissant, concentré et riche en alcool, avec une longue
persistance.
On ressent un boisé d’élevage pour le moins “rustique”.
Le vin se boit bien, mais on doit reconnaître qu’il manque quelque peu
de raffinement.
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CONCLUSIONS
Les différences entre les millésimes puissants et concentrés de l’époque “moderne” et
les plus anciens sont bien sensibles à l’heure actuelle.
Margaux 1983 et surtout Mouton 1986 sont marqués par un travail conséquent à la
vinification et à l’élevage pour obtenir la consistance voulue par les dégustateurs
internationaux. Ils sont encore trop jeunes, mais un fait très positif est à retenir: avec
le temps, ils me paraissent moins massifs qu’à leur début. On comprend parfaitement
pourquoi les dégustateurs leur accordent les plus hautes notes.
Haut-Brion 1988 est aussi bien “extrait”, mais le savoir-faire de la maison accomplit des merveilles
pour mettre en valeur sa noble naissance.
Ausone est resté Ausone, avec son style plus hermétique. Le 1986 n’est pas (encore) influencé
par la nouvelle tendance. C’est de toute façon un vin vraiment magnifique.
Lafite 2001 est bien “suivi”, mais je crois que la matière première ne prêtait pas
à la recherche de l’extraction. Les responsables ont judicieusement évité les
déséquilibres en restant prudents lors de la vinification.
Les vins plus âgés sont plus subtils. Ils sont perçus comme plus “faibles” si on ne goûte que des
vins “actuels”. Un Ausone 1976 paraîtra bien “léger” à côté d’un Mouton 1986. Mais lequel est
le plus subtil? Lequel est celui qui se boit le mieux? Pour moi, ils méritent la même note!
Etonnamment, les 1975 (Haut-Brion et Cheval Blanc) et 1970 (Haut-Brion et Ausone) servis
furent pour moi au-dessus de tous ceux dégustés à ce jour (pour les mêmes crus). Pourtant,
ces deux millésimes nous ont toujours fait douté. Les bouteilles étaient peut-être absolument
parfaites: le fait est qu’elles furent appréciées au plus haut point par les convives.
Reprenons les vins par crus.
Lafite fut assez décevant dans l’ensemble, même si le 1976 m’a beaucoup plu par son côté
gourmand.
Haut-Brion a produit une quantité quasi inégalée de grands millésimes au 20ème siècle.
Les trois vins dégustés sont tous des réussites. J’ose croire que 1975 et 1970 ont enfin
décidé de dévoiler leurs charmes longtemps cachés.
Ausone fut impressionnant. C’est toujours un cas à part dans la cour des grands. On sait que
1976 et 1964 furent parmi les plus belles réussites de ce domaine: la confirmation est éclatante.
Par contre, 1970, considéré comme vraiment faible chez Ausone, n’a pas du tout été dépassé
par les deux vedettes. Je n’arrive pas à savoir à quoi cela tient. Est-ce qu’il fut totalement fermé
durant plus de trois décennies?
Mouton 1986 et Margaux 1983, on l’a dit, sont des vedettes incontestables dans leur style, et
c’est bien mérité.
Les Cheval Blanc réputés (1982, 1961, 1947,…) sont merveilleusement exubérants et pleins de
vie, avec des rondeurs aguichantes. 1975 les suit de près….seulement si la bouteille est parfaite.
Pétrus 1947 est mal tombé face à cette avalanche de grands seigneurs. Il est aisé de constater
que la mise Sanders (du moins cette bouteille) n’est de très loin pas au niveau pharaonique de
la mise d’origine.